En Belgique, il existe fondamentalement trois voies d’obtention de la nationalité du Royaume.

Et de fait, l’article premier du Code de la nationalité belge (CNB) stipule en son paragraphe premier que : « l’obtention de la nationalité s’appelle acquisition ou attribution, suivant qu’elle est ou non subordonnée à un acte volontaire de l’intéressé tendant à cette obtention ».

À côté de l’acquisition et de l’attribution de la nationalité, s’ajoute un troisième medium – quelque peu historique, ce qui explique du reste que le Législateur l’ait omis de l’article premier, qu’est la naturalisation, visée aux articles 18 et suivants du CNB.

Seules la naturalisation – (Sous §1) et l’acquisition de la nationalité – (Sous §2) retiendront notre attention dans la cadre du présent tour d’horizon des voies d’obtention de la nationalité ; et ce, dans la mesure où l’attribution de la nationalité dépend des circonstances de la naissance du sujet ou de son adoption.

Il importe de relever à ce stade que les Citoyens de l’Union Européenne sont soumis aux mêmes conditions et procédures que les Citoyens non-européens.

§1.- LA NATURALISATION

Pour le moins exceptionnelle, et n’appelant pas à de longues observations, nous nous bornerons à esquisser – à gros traits – les contours de cette première voie d’accès, pour mieux non consacrer ensuite à la procédure d’acquisition de la nationalité.

La naturalisation confère, tel qu’édicté à l’article 18 du CNB, la nationalité belge ; cependant, pour pouvoir prétendre à cette procédure, l’intéressé, âgé de 18 ans au moins et séjournant légalement en Belgique, doit « avoir témoigné ou pouvoir témoigner à la Belgique de mérites exceptionnels dans les domaines scientifique, sportif ou socioculturel et, de ce fait, pouvoir apporter une contribution particulière au rayonnement international de la Belgique »[1].

Et le Législateur de préciser que, sous peine d’irrecevabilité, le candidat doit pouvoir fournir la preuve des éléments suivants :

― en cas de mérites exceptionnels dans le domaine scientifique : [avoir obtenu] un doctorat ;

― en cas de mérites exceptionnels dans le domaine sportif : avoir satisfait aux critères de sélection internationaux ou aux critères imposés par le COIB pour un championnat d’Europe, un championnat du monde ou les Jeux olympiques, ou se trouver dans le cas où la fédération de la discipline sportive concernée considère qu’il ou elle peut représenter une valeur ajoutée pour la Belgique dans le cadre des phases éliminatoires ou finales d’un championnat d’Europe, d’un championnat du monde ou des Jeux olympiques ;

― en cas de mérites exceptionnels dans le domaine socioculturel : avoir atteint la sélection finale d’une compétition culturelle internationale ou être récompensé sur la scène internationale en raison de ses mérites sur le plan culturel ou en raison de son investissement social et sociétal.

Outre cela, le candidat doit encore « motiver pourquoi il lui est quasiment impossible d’acquérir la nationalité belge »[2] par le biais des modes d’acquisition de la nationalité belge – que nous détaillerons infra.

Au-delà, la procédure de naturalisation peut également être enclenchée par un étranger qui a atteint l’âge de dix-huit ans « et qui a la qualité d’apatride en Belgique en vertu des conventions internationales qui y sont en vigueur, et qui séjourne légalement en Belgique depuis deux ans au moins »[3].

Rappelons brièvement qu’un apatride est, aux termes de la Convention de New York du 28 SEPTEMBRE 1954, « toute personne qu’aucun État ne considère comme son ressortissant par application de sa législation »[4].

Autrement dit, un apatride est une personne dépourvue de toute nationalité et ne bénéficiant de la protection d’aucun État ; cette situation, ostensiblement kafkaïenne, résulte tantôt d’un cafouillage administratif, tantôt d’une déchéance de nationalité (!), tantôt de dispositions législatives nationales.

Sur un plan pratico-pragmatique, la demande de naturalisation est adressée à l’Officier de l’État civil du lieu où l’intéressé a sa résidence principale, ou directement à la Chambre des Représentants.

Le formulaire de demande devra impérativement contenir la mention manuscrite suivante : « Je déclare vouloir acquérir la nationalité belge et me soumettre à la Constitution, aux lois du peuple belge et à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales »[5].

Dans les cinq jours ouvrables qui suivent le dépôt de la demande de naturalisation, une copie de celle-ci est communiquée pour avis et par les soins de la Chambre des Représentants, au Parquet du Tribunal de Première Instance de la résidence principale du demandeur, à l’Office des étrangers et à la Sûreté de l’Etat.[6]

À défaut d’observations formulées par le Parquet, l’Office des étrangers et la Sûreté de l’Etat dans un délai de quatre mois, éventuellement prolongé d’un mois, l’avis est d’office réputé favorable

Cependant, la Chambre des Représentants statue souverainement, quant à l’octroi de la naturalisation.

En cas de refus, il est loisible au candidat de réintroduire une nouvelle demande.

Adopté par la Chambre des Représentants et sanctionné par le Roi sur la proposition du Ministre de la Justice, l’acte de naturalisation est publié au Moniteur belge. Cet acte produit ses effets à compter du jour de cette publication ; il n’y a donc aucun effet rétroactif.

On relèvera encore que la demande de naturalisation devient caduque si, après introduction, son auteur cesse d’être en séjour légal en Belgique ou cesse d’y avoir sa résidence principale[7].

§2.- L’ACQUISITION DE LA NATIONALITÉ BELGE

L’acquisition de la nationalité belge se fait par le biais d’une déclaration[8] ; est habilité à introduire pareille déclaration de nationalité, l’étranger majeur qui :

― est né en Belgique et y séjourne légalement depuis sa naissance[9] ;

― est handicapé(e), invalide, ou retraité[10] ;

― réside légalement en Belgique depuis 10 ans ininterrompu[11]

― réside légalement en Belgique depuis 5 ans sans interruption[12] ;

― est marié(e) avec une personne de nationalité belge[13] ;

― est parent du premier degré d’un enfant mineur belge[14].

Il s’agit bien évidemment d’exigences principales qui doivent s’inscrire dans un faisceau de conditions de fond ; examinons brièvement celles-ci au travers des différentes options :

a.- sur base de la naissance en Belgique

Ce premier cas de figure n’appelle pas à développements ; et pour cause, il suffit d’avoir atteint l’âge de dix-huit ans, d’être né en Belgique et d’y séjourner légalement depuis sa naissance.

On rappellera, tout au plus, que la condition territoriale est remplie dès lors que la naissance s’est opérée sur le territoire belge ; ainsi, une naissance, à bord d’un avion ou d’un navire battant pavillon belge, dans une ambassade ou un consulat belge, vaut ipso facto naissance en Belgique.

b.- sur base d’un handicap, une invalidité, ou l’âge de la retraite

Pour bénéficier de cette seconde voie d’accès à la nationalité, le candidat devra avoir atteint l’âge de dix-huit ans, prouver qu’il séjourne légalement en Belgique depuis cinq ans au moins ; et qu’il ne peut, en raison d’un handicap ou d’une invalidité, ni occuper un emploi ni exercer une activité économique, à moins qu’il n’ait atteint l’âge (légal) de la pension.

c.- sur base d’un séjour légal ininterrompu de 10 ans

Le Citoyen étranger majeur, qui séjourne légalement en Belgique depuis dix ans, sera habilité à introduire une déclaration de nationalité.

Il devra toutefois y adjoindre preuve de connaissance d’une des trois langues nationales ; rappelons à cet égard que la connaissance minimale requise correspond au niveau A2 du Cadre européen commun de référence pour les langues[15].

En outre, le candidat sera amené à justifier de sa participation à la vie de sa Communauté (linguistique) d’accueil.

Le Législateur a pris soin de préciser que cette preuve peut être apportée par toutes voies de droit, et contiendra des éléments attestant que le demandeur prend part à la vie économique et/ou socioculturelle de cette Communauté.

d.- sur base d’un séjour légal de 5 ans sans interruption

Quant au Citoyen étranger majeur, qui séjourne légalement en Belgique depuis cinq ans, il devra également, aux dires de l’article 12bis du Code de la nationalité belge, prouver :

1.- sa connaissance d’une des trois langues nationales ;

2.- son intégration sociale :

▪ soit par un diplôme ou un certificat délivré par un établissement d’enseignement organisé, reconnu ou subventionné par une Communauté ou par l’Ecole royale militaire et qui est au moins du niveau de l’enseignement secondaire supérieur ;

▪ soit en ayant suivi une formation professionnelle d’au moins 400 heures reconnue par une autorité compétente ;

▪ soit en ayant suivi un cours d’intégration prévu par l’autorité compétente de sa résidence principale au moment où il entame son cours d’intégration ;

▪ soit, enfin, en ayant travaillé de manière ininterrompue au cours des cinq dernières années comme travailleur salarié et/ou comme agent statutaire nommé dans la fonction publique et/ou comme travailleur indépendant à titre principal ;

On notera attentivement que toute personne qui apporte la preuve de son intégration sociale prouve automatiquement sa connaissance linguistique (!).

3.- sa participation économique au Pays : et ce, en ayant travaillé pendant au moins 468 journées de travail au cours des cinq dernières années en tant que travailleur salarié et/ou agent statutaire dans la fonction publique ; soit en ayant payé, en Belgique, dans le cadre d’une activité professionnelle indépendante exercée à titre principal, les cotisations sociales trimestrielles dues par les travailleurs indépendants pendant au moins six trimestres au cours des cinq dernières années.

Ceci étant, la durée de la formation requise pour établir l’intégration sociale du candidat est déduite de la durée de l’activité professionnelle requise de 468 jours minimum ou de la durée de l’activité professionnelle indépendante à titre principal.

c.- être marié(e) avec une personne de nationalité belge

S’agissant maintenant de l’étranger majeur, qui séjourne légalement en Belgique depuis cinq ans, et qui est marié(e) avec un(e) Belge, il sera appelé à prouver :

1.- sa cohabitation en Belgique avec son/sa partenaire depuis au moins trois ans ininterrompus ;

2.- sa connaissance d’une des trois langues nationales, selon les conditions susévoquées ;

3.- son intégration sociale :

▪ soit par un diplôme ou un certificat délivré par un établissement d’enseignement organisé reconnu ou subventionné par une Communauté ou par l’Ecole royale militaire et qui est au moins du niveau de l’enseignement secondaire supérieur ;

▪ soit en ayant suivi une formation professionnelle d’au moins 400 heures reconnue par une autorité compétente, et en ayant travaillé, au cours des cinq dernières années, pendant au moins 234 journées comme travailleur salarié et/ou comme agent statutaire nommé dans la fonction publique ou en ayant payé en Belgique, dans le cadre d’une activité professionnelle indépendante à titre principal, les cotisations sociales trimestrielles dues par les travailleurs indépendants pendant au moins trois trimestres ;

▪ soit, en ayant suivi un cours d’intégration prévu par l’autorité compétente de sa résidence principale au moment où il entame son cours d’intégration.

d.- être parent du premier degré d’un enfant mineur belge

Enfin, l’étranger majeur, qui séjourne légalement en Belgique depuis cinq ans, et qui est « l’auteur »[16] ou l’adoptant d’un enfant belge qui n’ayant pas atteint l’âge de dix-huit ans ou n’étant pas émancipé avant cet âge, il devra répondre aux mêmes conditions de fond mutatis mutandis servatis servandis que le candidat qui est marié avec une personne de nationalité belge.

Dans la pratique, le candidat opère simple déclaration devant l’Officier de l’État civil de sa résidence principale. Cette déclaration comporte également, préalablement à la signature de l’étranger, la mention manuscrite : « Je déclare vouloir acquérir la nationalité belge et me soumettre à la Constitution, aux lois du peuple belge et à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales »[17].

L’Officier de l’État civil transmet, pour avis, une copie de l’intégralité du dossier au Procureur du Roi du Tribunal de Première Instance du ressort concerné, ainsi qu’à l’Office des étrangers et à la Sûreté de l’Etat[18].

Dans un délai de quatre mois, le Procureur du Roi peut émettre un avis négatif, dûment motivé, sur l’acquisition de la nationalité belge lorsqu’il existe un empêchement résultant de faits personnels graves, ou lorsque les conditions de base ne sont pas remplies[19].

À défaut d’avis négatif délivré par le Parquet dans un délai de quatre mois, éventuellement prolongé d’un mois, la déclaration est d’office enregistrée.

Dans l’hypothèse d’un avis négatif, le candidat peut inviter l’Officier de l’État civil à transmettre son dossier au Tribunal de Première Instance de son ressort. Après avoir entendu ou appelé l’intéressé, le Tribunal statue par voie de décision motivée[20].

Dans les quinze jours de la notification du jugement, le candidat et le procureur du Roi peuvent interjeter appel de la décision, par requête adressée à la Cour d’Appel. Celle-ci statue, après avis du Procureur général, et après avoir entendu ou appelé l’intéressé.

En vertu de l’article 238 du Code des droits d’enregistrement, d’hypothèque et de greffe, « il est perçu un droit sur les procédures d’acquisition de la nationalité belge. Le droit s’élève à 150 EUROS. Le droit doit être acquitté avant l’introduction de la demande ou avant le dépôt de la déclaration »[21].

Votre Dévoué,

[1] Code de la nationalité belge, Art. 19, §1.

[2] Code de la nationalité belge, Art. 19, §1, 4°.

[3] Code de la nationalité belge, Art. 19, §2.

[4] Convention du 28 SEPTEMBRE 1954 relative au statut des apatrides, New-York, eev 06.06.1960, Recueil des Traités des Nations-Unies, Vol. 360, n° 5148, pp. 118 et ss., Art.1.

[5] Code de la nationalité belge, Art. 21, §1er.

[6] Code de la nationalité belge, Art. 21, §5.

[7] Code de la nationalité belge, Art. 21, §4.

[8] Code de la nationalité belge, Art. 12bis.

[9] Code de la nationalité belge, Art. 12bis, §1, 1°.

[10] Code de la nationalité belge, Art. 12bis, §1, 4°.

[11] Code de la nationalité belge, Art. 12bis, §1, 5°

[12] Code de la nationalité belge, Art. 12bis, §1, 2°.

[13] Code de la nationalité belge, Art. 12bis, §1, 3°.

[14] Code de la nationalité belge, Art. 12bis, §1, 3°.

[15] Code de la nationalité belge, Art. 1, §2, 5°

[16] Vid. Code de la nationalité belge, Art. 12bis, §1, 3°, d).

[17] Code de la nationalité belge, Art. 12bis, §3.

[18] Code de la nationalité belge, Art. 15, §2, in fine.

[19] Code de la nationalité belge, Art. 15, §3.

[20] Code de la nationalité belge, Art. 15, §5.

[21] Code des droits d’enregistrement, d’hypothèque et de greffe, Art. 238.